Le débat sur les droits de plantation…

Le droit de plantation en viticulture s’identifie comme un droit à produire du vin ;cette notion est aussi ancienne en France que son »code du vin « édicté en 1935.
La réglementation Française a largement inspiré la réglementation communautaire en particulier à travers cette notion de droit de plantation comme outil de régulation de la production viticole Européenne.
Le droit de plantation est strictement encadré dans les pays viticoles de l’Union Européenne ; disposer d’un droit de replantation pour une exploitation viticole dûment identifiée est la seule possibilité pour planter de la vigne ;ce droit correspond à une surface identique ayant fait l’objet d’un arrachage préalable au sein de la même exploitation.
Cette règle comporte deux dérogations :
•    Une possibilité d’augmenter le potentiel de production de l’exploitation à travers une autorisation de plantation nouvelle :cette disposition est encadrée dans des contingents limités pour les productions d’AOC et Vins de Pays en fonction de la situation économique des vignobles concernés.
•    Une possibilité de transfert du droit de replantation d’une exploitation à une autre par vente et achat pour éviter la perte du potentiel viticole d’une région et permettre de favoriser le développement des exploitations les plus dynamiques.

En résumé ces dispositions ont à la fois un but de régulation économique en maitrisant le potentiel de production et un but qualitatif en réservant la viticulture à des zones qualitativement reconnues dans le cadre des AOC et Vins de Pays.

Les discussions sont en cours pour la nouvelle PAC(Politique Agricole Commune)qui doit voir le jour au 1er janvier 2014.La Commission Européenne a publié son intention de faire disparaître tous les instruments de maîtrise de la production en cours dans l’agriculture(lait, vin, sucre….).
Dans le cadre de cette doctrine la Commission a proposé dès 2006 une réforme ultra libérale de la viticulture Européenne afin de rendre le marché du vin plus concurrentiel ;la mesure phare en serait la disparition de la réglementation sur les droits de plantation.
Malgré une opposition déjà naissante les ministres des Etats membres ont décidé le 19 décembre 2007 l’application effective de cette mesure le 1er janvier 2016 libre à chaque Etat qui le souhaiterait de maintenir ce système au niveau national jusqu’au 31 décembre 2018.

L’application de cette réforme aurait des conséquences incalculables :il deviendrait possible de planter de la vigne dans n’importe quelle exploitation agricole, n’importe où y compris dans des Etats ou des Régions où il n’y a pas de vigne aujourd’hui.
Cette libéralisation permettrait de tripler les surfaces actuellement plantées en AOC en France ;en effet la surface AOC en production est actuellement de 464 000ha mais l’ensemble des aires délimitée est de 1,6millions d’ha. ;cette augmentation non maitrisée de la production entrainerait un déséquilibre offre/demande avec de lourdes conséquences sociales et environnementales.
Certains départements non viticoles et des pays d’Europe centrale ont déjà manifesté leur intention de créer de nouveaux vignobles ;il sera très difficile d’argumenter contre ce projet au nom de la sacro-sainte notion de liberté à produire ;et pourtant nous savons que l’exception viticole se justifie.
Passé la période d’incrédulité, l’opposition à ce projet s’est largement amplifiée :sous l’impulsion des Organisme des Défense et de Gestion des AOC et Vins de Pays elle fait maintenant largement consensus dans le monde du vin, au niveau des professionnels, des élus politiques de tous bords, des collectivités territoriales ;à l’issue du récent congrès des maires de France les élus de la vigne ont lancé une campagne de mobilisation.
A ce jour ce sont 13 Etats membres de l’Union Européenne qui sont opposés à la libéralisation des droits de plantation mais ce n’est pas suffisant car une majorité qualifiée est nécessaire au Conseil des Ministres pour revenir sur cette décision ;il faut convaincre les pays non producteurs.
Le parlement Européen est favorable à revoir ce sujet à l’occasion de la discussion sur la réforme de la PAC.
La Commission Européenne organe exécutif chargé de préparer les textes reste pour l’instant sourde aux demandes des Etats membres ;elle reste fidèle à la doctrine libérale sans proposer d’outil de régulation dans la réforme de la PAC.
Au début 2012 il faut s’attendre à voir la pression monter de la part des organisations professionnelles, des élus et des régions viticoles pour se faire entendre ;ce sera la dernière occasion pour convaincre de conserver certains principes de la bonne gouvernance en viticulture.

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