Investir dans la vigne à l’ère climatique : risques, capex… et glissement des AOP……

Le changement climatique ne rebat pas seulement les cartes agronomiques : il modifie les bilans d’investissement, les trajectoires de valeur des terroirs et, déjà, la définition même de ce qu’est une appellation. Sécheresse, mildiou, gels printaniers, grêle, mais aussi réforme de l’assurance, irrigation sous dérogation, cépages dits « VIFA » ou résistants, arrachages massifs dans certaines zones : en 2025, investir en vignoble français suppose d’intégrer un nouveau mix de risques, de capex et d’opportunités.

Conséquences clés pour l’investissement viticole en France

a) Un risque productif structurel, plus volatil

La fréquence et l’intensité des aléas ont bondi : 2024 a vu une vendange nationale révisée à –18 % (mildiou, gel, grêle, excès d’eau/chaud), confirmant une volatilité de volume inédite pour de nombreux bassins. En Nouvelle-Aquitaine, 90 % des vignerons ont subi des pertes liées au mildiou en 2023. Ces chocs font mécaniquement remonter le besoin en fonds de roulement et fragilisent le service de la dette.

b) Capex d’adaptation (et Opex récurrents) à budgéter

  • Replantation/restructuration : de ~30 000 à 45 000 €/ha selon itinéraire (hors chai), avec arrachage souvent 2 600–3 700 €/ha. Aides FranceAgriMer possibles mais plafonnées.
  • Irrigation (goutte-à-goutte) : installation typique 1 520–3 400 €/ha (+ 420–560 € de pose), entretien ~78 €/ha/an, hors coût de l’eau et éventuels raccordements (~2 000 €/ha observés). Dérogations AOP nécessaires et de plus en plus accordées localement.
  • Gel : tours antigel 40–50 k€ l’unité (4–5 ha typiques), soit 8–12 k€/ha d’investissement ; compter ~800 €/ha/an d’amortissement + ~250 €/ha/an de fonctionnement.
  • Grêle : filets de 7 000 à 15 000 €/ha (jusqu’à 25 000 €/ha selon systèmes/relief), avec un surcroît de main-d’œuvre. Ces montants changent la donne : un domaine de 20 ha qui « coche » deux ou trois briques d’adaptation peut engager plusieurs centaines de milliers d’euros de capex et +3–6 % d’Opex récurrent sur les postes énergie/maintenance/assurance.

c) Assurance récolte : amortisseur (partiel) mais pas une panacée

La réforme entrée en vigueur (2023–2025) subventionne 70 % de la prime et instaure un « trois étages » avec intervention de solidarité nationale (ISN) sur les sinistres catastrophiques. Taux d’indemnisation plus favorable pour les assurés ; nettement moindre pour les non-assurés. Pour l’investisseur, la couverture réduit la queue de risque mais n’annule ni la dérive des capex ni le risque marché.

d) Marché des actifs : dispersion des prix et arbitrages territoriaux

Le rapport SAFER 2025 relève une forte hétérogénéité : recul des prix dans plusieurs zones (notamment Bordeaux-Aquitaine), hausse ailleurs, volumes de transactions contrastés. Les plans d’arrachage en Gironde (depuis 2023) accélèrent les recompositions, avec effets locaux sur l’offre foncière et la liquidité.

OdisViti ©

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